Res novæ 23 – nov. 2020
Cher Lecteur, chère Lectrice, |
Veuillez trouver ci-dessous les articles de novembre 2020 de la Lettre mensuelle d’information et d’analyse Res Novae : – Aux racines de la crise catéchétique : un magistère incertain, par l’abbé Claude Barthe – Une Curie toujours plus centralisatrice, par Pio Pace – Reconstruire la catéchèse 2ème partie, par l’abbé Jean-Marie Perrot Nous vous en souhaitons une bonne lecture. L’équipe de Res Novae Aux racines de la crise catéchétique : un magistère incertain Nous disions dans notre dernière livraison que la prolifération des catéchèses hétérodoxes ou inconsistantes était due au fait que l’autorité n’avait jamais pris les moyens de la combattre. Il y a plus grave : de même que les organes magistériels ont comme bafouillé dans certains engagements conciliaires, de même en matière catéchétique, l’autorité ecclésiale a paru douter du message à transmettre. Nous prendrons comme exemple le caractère propitiatoire de la messe et ce qu’en dit le Catéchisme de l’Église catholique. La propitiation absente de la définition de la messe dans la 1ère édition du CEC La messe est un sacrifice réitérant le sacrifice de la Croix, offert pour la réparation des péchés. Comme on sait, l’effacement de cette affirmation s’est traduit fâcheusement dans la nouvelle liturgie : parmi les édulcorations qu’on peut lui reprocher, celle-ci est assurément la plus impressionnante. Édulcoration et même oubli présent dans la première édition du Catéchisme de l’Église catholique de 1992 (1) , ceci a été rectifié lors de la deuxième édition de 1997 (2) . Pour la bien comprendre, il faut revenir à l’une des définitions les plus célèbres du Concile de Trente, au chapitre II du décret sur le sacrifice de la messe, 22ème session du concile (Dz 1743) : « Parce que, dans ce divin sacrifice qui s’accomplit à la messe, ce même Christ est contenu et immolé de manière non sanglante, lui qui s’est offert une fois pour toutes de manière sanglante sur l’autel de la Croix, le saint concile enseigne que ce sacrifice est vraiment propitiatoire, et que par lui il se fait que, si nous nous approchons de Dieu avec un cœur sincère et une foi droite, avec crainte et respect, contrits et pénitents, nous obtenons miséricorde et nous trouvons la grâce d’un secours opportun (He 4, 16). Apaisé par l’oblation de ce sacrifice, le Seigneur, en accordant la grâce et le don de la pénitence, remet les crimes et les péchés, même ceux qui sont énormes. C’est en effet une seule et même victime, c’est le même qui, s’offrant maintenant par le ministère des prêtres, s’est offert alors lui-même sur la Croix, la manière de s’offrir étant seule différente. Les fruits de cette oblation – celle qui est sanglante – sont reçus abondamment par le moyen de cette oblation non sanglante ; tant il s’en faut que celle-ci ne fasse en aucune façon tort à celle-là. C’est pourquoi, conformément à la tradition des apôtres, elle est légitimement offerte, non seulement pour les péchés, les peines, les satisfactions et les autres besoins des fidèles vivants, mais aussi pour ceux qui sont morts dans le Christ et ne sont pas encore pleinement purifiés. » Dans sa première édition, celle de 1992, le CEC disait en son n°1367 : « Le sacrifice du Christ et le sacrifice de l’Eucharistie sont un unique sacrifice : “C’est une seule et même victime, c’est le même qui offre maintenant par le ministère des prêtres, qui s’est offert lui-même alors sur la Croix. Seule la manière d’offrir diffère” : “Dans ce divin sacrifice qui s’accomplit à la messe, ce même Christ qui s’est offert lui-même une fois de manière sanglante sur l’autel de la Croix, est contenu et immolé de manière non sanglante” ». Référence était faite à la définition du Concile de Trente, mais la citation sectionnait la phrase citée en lui enlevant son caractère de conclusion (« Parce que,… ») et surtout, elle omettait l’affirmation finale : « … ce sacrifice est vraiment propitiatoire ». La rectification de la 2ème édition du CEC Un certain nombre de points comme celui-ci, généralement de moindre importance, ont ému des théologiens qui ont adressé leurs critiques à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, laquelle en a tenu compte pour l’établissement d’une deuxième édition. Le n°1367 de l’édition de 1997 (1998, pour l’édition française) y est ainsi rédigé : « Le sacrifice du Christ et le sacrifice de l’Eucharistie sont un unique sacrifice : “C’est une seule et même victime, c’est le même qui offre maintenant par le ministère des prêtres, qui s’est offert lui-même alors sur la Croix. Seule la manière d’offrir diffère” : “Et puisque dans ce divin sacrifice qui s’accomplit à la messe, ce même Christ qui s’est offert lui-même une fois de manière sanglante sur l’autel de la Croix, est contenu et immolé de manière non sanglante, ce sacrifice est vraiment propitiatoire” ». Référence, cette fois parfaitement justifiée, à la définition du Concile de Trente (Dz 1743), puisque le CEC en cite la substance. Assurément, d’autres catéchismes postérieurs au Concile de Trente, sont nettement plus explicites que le CEC. Ainsi, le Catéchisme du Concile de Trente : « Les choses étant ainsi, il faut sans aucune hésitation enseigner avec le saint Concile que l’auguste Sacrifice de la Messe n’est pas seulement un Sacrifice de louanges et d’actions de grâces, ni un simple mémorial de celui qui a été offert sur la Croix, mais encore un vrai Sacrifice de propitiation, pour apaiser Dieu et nous le rendre favorable. Si donc nous immolons et si nous offrons cette victime très sainte avec un cœur pur, une Foi vive et une douleur profonde de nos péchés, nous obtiendrons infailliblement miséricorde de la part du Seigneur, et le secours de sa Grâce dans tous nos besoins. Le parfum qui s’exhale de ce Sacrifice lui est si agréable qu’Il nous accorde les dons de la grâce et du repentir, et qu’Il pardonne nos péchés. Aussi, l’Église dit-elle dans une de ses Prières solennelles : « Chaque fois que nous renouvelons la célébration de ce sacrifice, nous opérons l’œuvre de notre salut. » [Secrète du 9e dimanche après la Pentecôte] Car tous les mérites si abondants de la Victime sanglante se répandent sur nous par ce Sacrifice non sanglant » (3). De même le Catéchisme de Saint Pie X : « Pour quelles fins offre-t-on le sacrifice de la Peut-être n’aurait-il pas été inutile non plus que le CEC fasse allusion à la dernière précision magistérielle intervenue à propos de l’essence du sacrifice eucharistique, « vrai sacrifice au sens propre », dans l’encyclique Mediator Dei de Pie XII, en 1947 : « Le sacrifice de l’autel n’est pas une pure et simple commémoration des souffrances et de la mort de Jésus-Christ, mais un vrai sacrifice, au sens propre, dans lequel par une immolation non sanglante, le Souverain Prêtre fait ce qu’il a déjà fait sur la Croix en s’offrant lui-même au Père éternel comme une hostie très agréable. […] En effet par la “transsubstantiation” du pain en Corps et du vin en Sang du Christ, son Corps ainsi que son Sang sont réellement présents, et les espèces eucharistiques sous lesquelles il est présent figurent la séparation du Corps et du Sang. C’est pourquoi la présentation en mémorial de sa mort qui s’est produite réellement au Calvaire est renouvelée dans les différents sacrifices de l’autel, lorsque par des signes clairs le Christ Jésus est signifié et montré dans l’état de victime » (5). Doctrine catéchétique ordinaire, doctrine catéchétique extraordinaire Ainsi, après près de vingt ans de vacatio de l’enseignement catéchétique romain après le concile Vatican II, on a voulu en, 1992, remplir le vide par la première édition du Catéchisme de l’Église catholique, mais sans qu’on puisse vraiment donner à cet ouvrage le statut plénier et l’autorité de ses prédécesseurs, puisque cinq ans après, l’édition de 1997 (1998 en français) a, entre autres, corrigé très opportunément l’oubli conséquent dont nous traitons ici. On pense à l’aventure, si l’on peut dire, similaire qu’a vécue la définition de la messe dans l’Institutio generalis, la Présentation générale, du missel de Paul VI du 3 avril 1969 : – Le n. 7, 2ème chapitre (De generalis structuræ missæ) de l’Institutio, déclarait dans la version présentée à la Salle de Presse Vaticane, le 2 mai 1969 : « La Cène du Seigneur, appelée aussi la Messe, est la sainte assemblée ou le rassemblement du peuple de Dieu qui se réunit sous la présidence du prêtre afin de célébrer le mémorial du Seigneur. C’est pourquoi, à ce rassemblement local de l’Église s’applique éminemment la promesse du Christ : « Là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, là je suis au milieu d’eux » (Mt 18, 20) ». – Après modification, le n. 7, 2ème chapitre, apparut dans l’édition typique du 26 mars 1970 (devenu n.27 de l’édition typique de 2002) en ces termes (les modifications sont ci-après en italique) : « À la messe ou Cène du Seigneur, le peuple de Dieu est convoqué et rassemblé, sous la présidence du prêtre, qui agit en la personne du Christ, pour célébrer le mémorial du Seigneur, ou sacrifice eucharistique. C´est pourquoi ce rassemblement local de la sainte Église réalise de façon éminente la promesse du Christ: « Lorsque deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis là, au milieu d´eux » Dans le cas du CEC ou dans celui de l’Institutio generalis, on ne peut que se réjouir de ces corrections doctrinales, tout en notant que ces incertitudes enlèvent toute prétention de magistère à ces définitions. Car, est intervenue aussi, en un sens libéral cette fois, une modification de l’article concernant la peine de mort (6). Il est cependant évident que les catéchismes anciennement édités par l’autorité romaine, et a fortiori le Concile de Trente lui-même, demeurent toujours pleinement valides. On peut donc dire que, comme la « forme extraordinaire » du rite romain coexiste avec la « forme ordinaire », les rigoureuses définitions du Catéchisme du Concile de Trente, jamais aboli, coexistent avec les énoncés catéchétiques nouveaux plus hésitants. Il y a, si l’on veut, une « doctrine catéchétique extraordinaire », jamais abolie, et une « doctrine catéchétique ordinaire » sujette à variations, parfois dans le sens d’une rigueur retrouvée ou parfois au contraire dans le sens de l’élargissement libéral. Abbé Claude Barthe (1) Édition française, Plon/Mame/Librairie Editrice Vaticane, traduction sur le texte typique latin, Libreria Editrice Vaticana, 1992. (2) Édition française, Centurion/Cerf/Fleurus-Mame/ Librairie Editrice Vaticane, 1998, traduction sur le texte typique latin, Libreria Editrice Vaticana, 1997. Nos réflexions s’appuient ici sur une longue note de l’abbé Grégoire Célier dans la Lettre à nos frères prêtres de juin 2010, « Retour sur la propitiation », pp. 3-4 (3) Chapitre 20, § 8. (4) Chapitre 5, § 1. (5) Dz 3848. (6) Le n. 2266 l’estimait légitime « dans des cas d’une extrême gravité ». Le nouveau n. 2267 indique : « l’Église enseigne à la lumière de l’Évangile que la peine de mort est inadmissible ». Une Curie toujours plus centralisatrice Les Congrégations pour le Clergé, pour les Instituts de vie consacrée, pour les Évêques, tiennent de plus en plus la bride serrée aux évêques dont la ligne n’est pas « correcte », et auprès desquels elles multiplient les visites canoniques, baptisées parfois « visites Par un rescrit du 11 mai 2016 il avait été décidé que l’érection d’un institut diocésain de vie consacrée, devait être précédée, sous peine de nullité, d’une consultation préalable du Saint-Siège, ceci au motif principal que les Successeurs des Apôtres pourraient procéder à des fondations « sans le discernement suffisant ». Tour de vis supplémentaire : le motu proprio Authenticum charismatis, du 1er novembre 2020 prend cette mesure inouïe, qui enlève aux évêques la possibilité d’ériger en toute indépendance un institut religieux, en modifiant le canon 579, de telle sorte que c’est une permission préalable du Saint-Siège – licentia – qui doit désormais être demandée et qu’elle doit être accordée par écrit – praevia licentia Sedis Apostolicae scripto data. Vous avez dit réforme de la Curie ? Vous avez dit synodalité ? Pio Pace Reconstruire la catéchèse Dans ces propositions à mettre en œuvre pour un avenir de l’Église à moyen terme, nous supposons que se soient manifestés un certain nombre de clercs de premier rang, spécialement d’évêques, animés non seulement d’une foi intègre, mais aussi d’une volonté décidée de reconstruction. L’évêque, premier catéchiste, et ses prêtres Il se trouve que l’insertion de la catéchèse dans la structure hiérarchique de l’Église est très clairement énoncée dans le nouveau Directoire dont nous avons parlé, et que nous allons utiliser pour notre propos en ce qu’il a de meilleur : elle est une dimension particulière de la mission, dont « la responsabilité primordiale » revient au « Pontife romain et [aux] évêques en communion avec lui » et qui consiste à « instruire le peuple de Dieu sur les contenus de la foi et de la morale chrétienne, ainsi que de promouvoir l’annonce dans le monde entier » (n°93). Dès lors, l’évêque diocésain peut et doit être « le premier catéchiste, (…) premier responsable de la catéchèse dans le diocèse » (n°114). Cette tâche comprend, certes, la possibilité de déléguer à des collaborateurs compétents et spécialement dédiés à cette tâche ; toutefois, affirme clairement le Directoire, elle implique d’abord qu’il y soit lui-même attentif, qu’il s’en occupe « directement » : c’est à lui qu’il incombe de fixer les grandes lignes de la catéchèse dans son diocèse, de mettre en place de manière pérenne les structures – personnes, moyens et outils –, de veiller sur la qualité des catéchistes (formation, rectitude doctrinale, exemplarité(1)) comme sur celle des parcours et outils pédagogiques. A plusieurs reprises, sont avancées les caractéristiques de cette fonction épiscopale : attention et même souci, efficacité, adaptation. Dans cette place primordiale et première de l’évêque diocésain se manifeste une tension entre liberté d’action et responsabilité inaliénable, vis-à-vis tant des commissions et des experts que de la conférence épiscopale à laquelle il appartient. Concernant cette dernière, il veillera, est-il écrit, à ce que son projet diocésain soit « en harmonie » avec ceux de la conférence (n°117). La formulation est vague ; elle renvoie à des précédents, par exemple à la déclaration de non-normativité du texte d’orientation publié en 2005 par la Conférence des évêques de France (cf. décret d’approbation de la Congrégation pour le Clergé mis en tête du document). Plus fondamentalement, il s’agit là d’une confirmation de l’indépendance de l’évêque diocésain vis-à-vis de la conférence, pour ce qui regarde l’enseignement de la foi et des mœurs (2). Sur ce plan, ainsi qu’il apparaît, seuls le lient véritablement « les principes et les normes émanant du Siège apostolique » (n°114), c’est-à-dire le présent Directoire. Ce qui vient d’être affirmé vaut aussi pour les prêtres ayant reçu mission de l’évêque et singulièrement les curés ; mutatis mutandis, car d’un côté, ils n’ont pas la même autonomie que l’évêque, étant ses collaborateurs dans la mise en œuvre du projet catéchétique diocésain (on les invite alors à éviter « toute forme de subjectivisme dans l’exercice du ministère sacré », n°121) ; mais, de l’autre, plus près du terrain, ils ont davantage prise sur les catéchistes : ils sont « catéchiste[s] des catéchistes », les connaissant et les accompagnant comme personnes et comme groupe (n°122). En amont, ils auront discerné quels sont ceux qu’ils peuvent appeler à cette tâche. De même, ils ont la possibilité et la responsabilité de suivre toutes les étapes de la préparation et de la mise en œuvre de la catéchèse dans leur paroisse (cf. n°120). On ne saurait trop insister, pensons-nous, sur cette réaffirmation forte de la structure ecclésiale et hiérarchique de la catéchèse car, en nombre de diocèses et de paroisses, depuis des décennies, elle est l’objet d’une délégation générale à des spécialistes ou des bonnes volontés solidement installées, via des lettres de mission qui parfois entrent en conflit avec les pouvoirs d’enseignement et de gouvernement des ministres sacrés, curés et aumôniers d’établissements scolaires en premier lieu. La première étape d’une reconstruction de la catéchèse apparaît bien ainsi devoir être un acte de volonté, par les autorités, d’être ce qu’elles doivent être. La responsabilité des parents et grands-parents Parmi les autres acteurs de la catéchèse (diacres, religieux, laïcs), deux points méritent d’être notés, tant ils nous semblent pourvoir accompagner le mouvement impulsé par la hiérarchie ou, si par malheur cela devait advenir, pallier son absence. Le premier point concerne les parents : citant Familiaris consortio, le Directoire rappelle que l’éducation chrétienne est une tâche à laquelle le sacrement du mariage consacre les parents. S’ils peuvent être aidées par la communauté paroissiale, scolaire ou autre, il est indispensable qu’ils « surmontent la mentalité de délégation si courante, selon laquelle la foi est réservée aux spécialistes », travers dans lequel la communauté tombe « parfois » (n°124). Les parents, conclut le paragraphe, sont les « premiers catéchistes de leurs enfants », dont les auxiliaires naturels (ou les suppléants, si les parents faisaient défaut par ignorance ou indifférence, mais laissaient carte blanche…) sont les parrains, marraines et les grands-parents (3) (cf. 125 et 126). La catéchèse, un service plus que jamais essentiel Le second aspect qui attire l’attention, est l’application à la catéchèse du sensus fidei, si cher au pape François et en fait si traditionnel. Nous venons de signaler comment le sacrement de l’ordre et celui du mariage ordonnent – différemment, il s’entend – de manière fondamentale et irréductible à l’enseignement de la foi. A cette dimension ecclésiale se joint une autre qui, elle, découle des sacrements du baptême et de la confirmation. Ces deux sacrements ordonnent toute l’Église et chaque baptisé et confirmé à la mission évangélisatrice de l’Église. Dans ce cadre, le sensus fidei de certains discernera qu’ils sont appelés à prendre une part plus active dans le ministère spécifique de la catéchèse. Et, avance le Directoire, il s’agit bien là d’un appel divin dont la conséquence est énoncée fortement : « Le catéchiste est un chrétien qui reçoit l’appel particulier de Dieu. Cet appel, accueilli dans la foi, le rend apte à se mettre au service de la transmission de la foi et de l’initiation à la vie chrétienne. » (n°112). On est manifestement dans le cadre des charismes qui, à côté des sacrements et des ministères et à un degré moindre, participent à la sanctification de l’Église (cf. par exemple Lumen gentium n°12). Cette aptitude est bien un service et ne saurait usurper les droits de la hiérarchie (4) ; mais celle-ci est invitée à la reconnaître, là où elle se manifeste ou se propose. Ce que fera par exemple le curé dans le discernement des personnes à appeler comme catéchistes, les insérant alors dans le cadre institutionnel. Mais est-ce s’avancer trop que de penser que les parents peuvent eux aussi discerner quelles sont, au-delà du cadre familial rappelé, les personnes les plus aptes à les aider à accomplir leur mission d’éducation de leurs enfants ? De nombreuses initiatives fonctionnent déjà sur ce modèle : groupes de prière ou d’apostolat devenant aussi des cours de catéchisme, revues utilisées dans les familles ou par des catéchistes dans des paroisses ou des établissements scolaires plus ou moins en catimini, etc. Si elles peuvent être nées en marge des structures ordinaires, ces initiatives pourraient être aussi une solution acceptée, encouragée ou mise en place par un évêque ou un curé, ne serait-ce que temporairement lorsque la réforme des instances catéchétiques ordinaires se révèle une œuvre titanesque de longue haleine. Ainsi ce curé de paroisse assurant un enseignement de la foi dans le groupe de servants de messe de sa paroisse ; groupe sur lequel il avait prise, alors que les lettres de mission des catéchistes prétendaient faire barrage à son regard sur ce qui passait au catéchisme. Le même multipliait les visites impromptues, au fil du temps liturgique, dans les classes de l’école paroissiale, court-circuitant avec l’approbation de la directrice l’équipe de catéchèse peu favorable à sa présence. En définitive, c’est à juste titre à une convergence des responsabilités et actions hiérarchiques, familiales et charismatiques à laquelle le Directoire invite. Cela doit prévaloir sur, et encadrer les dimensions d’expertise, si prégnante dans le mouvement catéchétique moderne. Cela doit prévaloir aussi sur la simple bonne volonté, touchante, mais malheureusement accordée à la pauvreté humaine des communautés d’aujourd’hui. * * * Mais, si nous avons abondamment cité le nouveau Directoire dans un esprit de « réforme de la réforme », nous n’oublions pas qu’il entérine nombre de traits caractéristiques du mouvement catéchétique des dernières décennies (primat de la pédagogie sur le contenu, des récits bibliques sur la doctrine, organisation en modules en partie optionnels ou interchangeables dans leur ordre, etc.), et, s’il s’efforce d’en pallier la faiblesse majeure qu’est le manque de structure garantissant l’intégrité et l’intégralité de la transmission de la foi il le fait en promouvant une dynamique d’initiation, catéchuménale, mystagogique et, maintenant, Abbé Jean-Marie Perrot (1) Cette exemplarité, si elle n’est pas explicitement mentionnée, se déduit immanquablement de la structure kérygmatique d’annonce de la foi, donnée à la catéchèse. Le catéchiste ne doit pas simplement enseigner les vérités de la foi, mais aussi témoigner de sa vie, de sa conversion continuelle, ne serait-ce que par sa présence au sein de la communauté paroissiale. D’ailleurs, dans le Directoire, on ne trouve pas trace, sauf erreur de notre part, d’une porte ouverte, d’un encouragement à la participation à la vie de l’Église des personnes en situation irrégulière par ces activités de catéchistes, comme on aurait pu le craindre. (2) C’est un cas particulier de l’absence de compétence magistérielle des conférences épiscopales, telle que le sanctionne le droit de l’Église. On se souvient que la première exhortation apostolique du pape François, Evangelii gaudium, avait suggéré qu’on réfléchît à « un statut des conférences épiscopales qui les conçoive comme sujet d’attributions concrètes, y compris une certaine autorité doctrinale authentique » (n°32). Aucun pas concret n’a été fait en ce sens, fort heureusement ; sauf, peut-être, dans l’approbation donnée au document de la conférence épiscopale argentine décidant d’adaptations de la doctrine à la pastorale des personnes en situation matrimoniale irrégulière, en vue de favoriser leur accès aux sacrements. (3) La mention des grands-parents est une nouveauté par rapport aux précédents documents. Cela tient sans aucun doute au constat que, une ou deux générations étant passées, c’est au niveau des grands-parents que demeurent encore quelques bases solides (bien que…), les parents ayant été les victimes du catéchisme qu’ils voudraient maintenant éviter à leur enfants… (4) Le Directoire n’aborde pas ce point, pourtant fort réel, bien que délicat dans sa mise en œuvre pratique. Car doit demeurer le principe suivant : « Parmi ces dons, la grâce accordée aux Apôtres tient la première place : l’Esprit lui-même soumet à leur autorité jusqu’aux bénéficiaires des charismes (cf. 1 Co 14). Le même Esprit qui est par lui-même principe d’unité dans le corps… » (Lumen gentium n°7). |